Deux lettres de Jacob Zwinger à son père Theodor Zwinger l'Ancien

Jakob Zwinger

Introduction: William Barton


Remarque: Cette recherche a été financée en totalité par le Fonds scientifique autrichien (FWF) [‘LAGOOS’ Y 1519-G], DOI 10.55776/Y1519, www.lagoos.org. Dans le cadre du libre accès, l’auteur applique une licence de droit d’auteur public CC-BY à cette soumission.

 

Date de composition: automne 1582. Les deux lettres indiquent le jour et le mois de leur rédaction en utilisant le calendrier attique, dans lequel le «Pyanepsion» correspond approximativement à la fin octobre et au début novembre. On ignore comment Zwinger a utilisé ce calendrier (a-t-il fait correspondre les mois du calendrier attique à son calendrier contemporain ou a-t-il calculé la date souhaitée selon le système original des mois lunaires?); la bibliothèque universitaire de Bâle indique toutefois dans son catalogue les 4 et 19 octobre comme dates des lettres.

Manuscrits: Bâle, Bibliothèque de l’Université, Frey-Gryn Mscr I 11:Bl.419 (lettre 1); Bâle, Bibliothèque de l’Université, Frey-Gryn Mscr I 11:Bl.420 (lettre 2).

 

Né le 15 août 1569 à Bâle, Jakob Zwinger est aujourd’hui surtout connu comme le fils du célèbre médecin et humaniste Theodor Zwinger l’Ancien (1533-1588), et comme le père de Theodor Zwinger le Jeune (1597-1654), un prédicateur et théologien éminent. Malgré sa mort prématurée peu après son 41ᵉ anniversaire, les propres réalisations de Jakob en tant qu’helléniste et médecin ne sont pas négligeables.

À l’âge de seize ans, Jakob acheva ses études à Bâle et se rendit en Italie pour poursuivre des études de médecine à l’Université de Padoue de 1586 à 1588. Dans cette ville, il entra en contact avec d’importants intellectuels italiens de l’époque, notamment Jacopo Zabarella et Alessandro Piccolomini. Après avoir voyagé à travers l’Italie et l’Allemagne pour approfondir sa formation, il revint à Bâle en 1593 et obtint son doctorat en médecine en 1594.

Dès 1595, Jakob fut nommé professeur de grec à l’Université de Bâle. L’année suivante, en 1596, il épousa Judith Brand (1579-1610), fille de l’homme politique et diplomate bâlois Bernhard Brand (1525-1594). De cette union naquit notamment Theodor Zwinger le Jeune.

Parallèlement à son enseignement du grec et à ses fonctions de recteur de l’Université de Bâle de 1606 à 1607, Jakob continua de cultiver ses intérêts humanistes et contribua à l’édition et à la publication des œuvres de son père, notamment l’édition augmentée du Theatrum vitae humanae en 1604. Jakob combina ensuite son expertise en histoire littéraire grecque et en médecine dans son Principiorum chymicorum examen (1606).

Parmi la correspondance majoritairement latine de Jakob Zwinger, conservée à la bibliothèque de l’Université de Bâle, on trouve pas moins de 32 lettres en grec ancien. Trois de ces lettres ont été écrites par Jakob lui-même. Le reste de ce corpus de lettres grecques provient d’une sélection d’intellectuels réformés – notamment le théologien et hébraïste anglais Hugh Broughton, dont le conflit avec Théodore de Bèze est bien étudié –, ainsi que d’un certain Emanuelos Achilleos, prêtre grec de Thessalonique. L’utilisation du grec ancien, aux côtés du latin, comme langue d’échange dans les milieux humanistes, particulièrement protestants, est reconnue par la recherche actuelle.

Les deux lettres grecques sont conservées dans des manuscrits autographes, avec l’adresse du destinataire au recto, ce qui indique qu’il s’agit des lettres originales. Jakob est alors âgé de treize ans; il écrit à son père depuis Eimeldingen, une ville située à une dizaine de kilomètres de Bâle, dans l’actuel Bade-Wurtemberg. D’après la seconde lettre présentée ici, Jakob se trouvait à Eimeldingen dans le cadre de ses études. Il est possible qu’en écrivant ces deux lettres en grec ancien, il ait voulu montrer à ses parents et au reste de sa famille sa maîtrise précoce du grec. Ces lettres sont donc intéressantes pour notre connaissance des progrès linguistiques d’un futur professeur de grec à la prestigieuse Université de Bâle à la fin du XVIᵉ et au début du XVIIᵉ siècle ainsi que pour l’aperçu qu’elles offrent de la relation intime entre un père et un fils à cette époque.

 

Bibliographie

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