Paraphrases de l'hymne Omni die dic Mariae
Traduction (Français)
Traduction: David Amherdt (notes originales en allemand: Clemens Schlip)
1
Né en 1599 à Appenzell, Eichmüller fit ses études à Milan, où il obtint un doctorat en théologie. Après avoir été ordonné prêtre en 1623 et avoir été chapelain, il devint prédicateur à Soleure (1625-1653), chanoine (1630), secrétaire du chapitre (1636) et prévôt (1649), ainsi que secrétaire des territoires soleurois dans le diocèse de Lausanne (1649). Après sa mort, une école latine fut créée à Appenzell grâce à son héritage. Voir à son sujet U. Fink, «Eichmüller, Johannes», Dictionnaire historique de la Suisse, version online du 06.06.2002, https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/025921/2002-06-06/. Le simple fait que Barzaeus lui ait dédié un poème complexe comme l’Omni die dic Mariae prouve qu’il devait posséder une culture littéraire et une éducation solides.
2
L’Église militante (Ecclesia militans) est l’Église sur terre, l’Église triomphante (Ecclesia triumphans) sont les rachetés du ciel.
3
C’est-à-dire augmenté par rapport à la première édition de 1648.
4
Casimir de Lituanie; voir l’introduction.
5
Le cothurne est la chaussure montante à semelle épaisse que portaient les acteurs des tragédies.
6
Originaire d’Antioche, Jean Chrysostome (344/49-407) passa du rang de prêtre dans sa ville natale à celui de patriarche de Constantinople. Il est considéré comme l’un des quatre grands Pères de l’Église grecque. Il était particulièrement célèbre pour son éloquence dans ses sermons (le surnom de Chrysostome qui lui a été donné signifie «bouche d’or»). Voir à son sujet K. H. Uthemann, «Johannes Chrysostomos», Biographisch-Bibliographisches Kirchenlexikon 3, (1992), p. 305-326.
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Soit dit en passant, l’image des petits filets d’eau touchant quelque chose «du bout des lèvres» n’est pas particulièrement réussie!
8
Scylla est une créature mythologique hideuse, mentionnée pour la première fois chez Homère (Odyssée 12,101 et suiv.; 12,235 et suiv.). Associée au monstre marin informe Charybde, elle rendait la navigation périlleuse dans un détroit dont Homère ne précise pas l’emplacement exact, mais que tradition antique a progressivement identifié avec le détroit de Messine, entre l’Italie et la Sicile. Dans les arts plastiques, Scylla est fréquemment représentée avec le torse d’une jeune femme et une partie inférieure composée de chiens sauvages – une iconographie qui ne découle pas directement du texte homérique. Dans le contexte présent, son nom est utilisé de manière métaphorique pour évoquer le danger. Quant au «tourbillon de Circé» évoqué par Barzaeus, l’expression semble dénuée de sens précis. Le seul lien entre Circé – la magicienne chez qui Ulysse séjourne – et Scylla réside dans le fait que Circé met en garde le héros contre les deux monstres et lui indique comment éviter leur menace (Odyssée 12,80-126). Il est possible que Barzaeus ait confondu les figures, associant à tort Circé à Charybde, cette dernière étant censée aspirer et rejeter la mer trois fois par jour dans un fracas assourdissant – phénomène qui peut être interprété comme un tourbillon.
9
Acroceraunia était le nom donné à la pointe nord de la côte escarpée des Ceraunii montes en Épire, qui était rocheuse et donc dangereuse pour la navigation.
10
C’est-à-dire Eichmüller, le dédicataire.
11
Le texte imprimé laisse entendre qu’il s’agit ici d’une citation, à l’instar des passages suivants. Nous n’en avons toutefois pas identifié la source.
12
Stat. silv. 1,4,130-131.
13
C’est-à-dire Stace, qui vient d’être cité. Sur lui, voir M. v. Albrecht, Geschichte der römischen Literatur. Von Andronicus bis Boethius und ihr Fortwirken, vol. 2, 32012, Berlin et Boston, De Gruyter, p. 795-809.
14
L’affirmation selon laquelle l’œuvre en question aurait été rédigée durant les heures tardives (c’est-à-dire en dehors des obligations quotidiennes) relève d’un topos littéraire largement répandu, qui n’en demeure pas moins plausible dans certains cas particuliers.
15
Montagne de Phocide, séjour d’Apollon et des Muses.
16
Surnom des Muses, aussi utilisé comme synonyme de Muses.
17
La conception des neuf chœurs angéliques remonte à l’ouvrage De coelesti hierarchia du pseudo-Denys l’Aréopagite (Ve-VIe siècle) et s’est depuis largement répandue dans la chrétienté, avec quelques modifications dans les détails. Voir à ce sujet A. Rosenberg, Engel und Dämonen. Gestaltwandel eines Urbildes, Munich, Kösel, 19862, p. 134-141.
18
On pourrait être tenté de voir dans cette remarque une allusion au chiffre symbolique des neuf Muses, qui aurait inspiré la structure du recueil. Toutefois, aucun autre indice ne vient étayer cette hypothèse.
19
Selon la mythologie gréco-romaine, Rhadamanthe est l’un des juges des Enfers. Voir à son sujet K. Schlapbach, «Rhadamanthys», Der Neue Pauly 10 (2001), p. 943-944.
20
Montagne de Béotie consacrée à Apollon et aux Muses.
21
Source de l’Hélicon.
22
Schönenwerd est situé au pied sud du Jura, au bord de l’Aar.
23
Il s’agit du sanctuaire de Mariä Himmelfahrt (Notre-Dame de l’Assomption) à Oberdorf, dans le canton de Nidwald, que Barzaeus mentionne dans le poème (Anagramma) qui suit la préface, parmi d’autres lieux de pèlerinage mariaux en Suisse (voir notre introduction à ce sujet). Nous n’avons pas pu déterminer dans quelle mesure Eichmüller s’est rendu utile à cette église, mais il nous semble possible qu’il y ait un lien avec les travaux de construction réalisés à Oberdorf dans la première moitié du XVIIe siècle; à ce sujet, voir S. Blank, «Die Baugeschichte der Wallfahrtskirche Mariä Himmelfahrt und des Kirchenbezirks in Oberdorf», Jahrbuch für Solothurnische Geschichte 88 (2015), p. 141-172, ici p. 151-153. Une mention d’Eichmüller est attestée dans le registre annuel de la paroisse d’Oberdorf; voir G. Jäggi, «Für das Seelenheil. Stiftungen für den Wallfahrtsort», Jahrbuch für Solothurnische Geschichte 88 (2015), p. 73-140, ici p. 78 et p. 113.
24
Donc le présent livre, le libellus.
25
Cf. Hor. ars 332: carmina linenda cedro («poèmes qui méritent d’être enduits d’huile de cèdre»); voir aussi, semblable, Pers. 1,42: cedro digna locutus («paroles qui méritent d’être enduites d’huile de cèdre»).
26
Cette fête fait référence à la tradition non biblique selon laquelle Marie aurait été conduite au temple de Jérusalem par ses parents alors qu’elle était encore enfant, et y serait demeurée jusqu’à ses fiançailles avec Joseph. Cette idée repose sur le protévangile apocryphe de Jacques (chapitre 7); pour la structure et le contenu de ce texte, voir U. U. Kaiser, «Protoevangelium des Jakobus», Das wissenschaftliche Bibellexikon im Internet, version d’octobre 2020, en ligne, https://bibelwissenschaft.de/stichwort/200185/.
27
Il s’agit de la naissance du Christ de la Vierge Marie.
28
Les hexamètres léonins (parfois aussi les pentamètres) se caractérisent par le fait que la césure (penthémimère, c’est-à-dire la césure du milieu du vers) rime avec la fin du vers. Après les premiers exemples chez Ovide, dans l’Antiquité tardive et au début du Moyen Âge, ce type de vers est devenu particulièrement fréquent au Xe-XIIe siècle. Comme le montrent ce vers et les suivants, Barzaeus estime possible que certains lecteurs aient des objections esthétiques à la poésie rimée latine. Celles-ci sont en effet parfois attestées dans les cercles humanistes. Voir à ce sujet F. Rädle, «Über mittelalterliche lyrische Formen im neulateinischen Drama», dans Litterae Medii Aevi, éd. M. Borgolte et H. Spilling, Sigmaringen, Jan Thorbecke, 1988, p. 339-362, ici p. 340-341.
29
Rhadamanthe, roi mythique de Crète, devint après sa mort l’un des juges des Enfers (cf. note 19).
30
Lykambès avait promis sa fille Néoboulé en mariage au poète grec Archiloque (vers 680-645). Lorsque cette promesse fut rompue, Archiloque s’en prit violemment, dans ses vers satiriques (iambes), au père comme à la fille, au point, selon la tradition, de les pousser au suicide, ainsi que les sœurs de Néoboulé. Voir à ce sujet E. Bowie et T. Heinze, «Archilochos», Der Neue Pauly 1 (1996), p. 994-997, ici p. 996. Barzaeus s’oppose ici à une critique virulente rappelant celle d’Archiloque.
31
Marquer au charbon, c’est-à-dire condamner. Voir Erasm. adag. «Creta notare. Carbone notare» (ASD II. 1, no 454, p. 527-528).
32
Donc, de la guerre de Troie (les Danaens sont les Grecs, les Phrygiens sont les Troyens).
33
Briarée est l’un des trois Hécatonchires (créatures «aux cent bras»), fils d’Ouranos et de Gaïa. Lui et ses frères aidèrent les dieux de l’Olympe dans leur combat contre les Titans. Voir R. Netz, «Hekatoncheires», Der Neue Pauly 5 (1998), p. 271.
34
Polyphème est le cyclope qui, dans l’Odyssée, se dispute avec Ulysse, dévore certains de ses compagnons et est rendu aveugle par le Grec (voir Odyssée 9, 105 et s.).
35
Il s’agit sans doute du philosophe cynique Diogène de Sinope (vers 413-323 av. J.-C.), qui prônait un mode de vie en rupture avec les conventions sociales. Voir à son sujet M.-O. Goulet-Cazé, «Diogène de Sinope», Der Neue Pauly 3 (1997), p. 598-600. Bien qu’il ne soit pas reconnu comme critique littéraire à proprement parler, Barzaeus le mentionne ici sans doute en raison de sa réputation de franc-parler et de son jugement incorruptible.
36
Gyaros est une île inhospitalière de la mer Égée, située dans le nord des Cyclades; elle servait de lieu d’exil à l’époque de l’Empire romain. Voir H. Kalcyk, «Gyaros», Der Neue Pauly 5 (1998), p. 15. L’expression ad Gyaros est surprenante, Gyaros (Γύαρος, ου) étant un féminin singulier.
37
Le cothurne était une chaussure montante à semelle épaisse que portaient les acteurs de tragédies grecques. Voir R. Hurschmann, «Kothurn», Der Neue Pauly 6 (1999), p. 781-782. Ici, le mot est utilisé de manière métaphorique pour souligner le haut niveau du poème de Barzaeus.
38
D’Aonie = de Béotie; avec l’Hélicon, la Béotie était considérée comme la patrie des Muses. Barzaeus fait ici allusion à ces dernières.
39
L’empyrée est le ciel le plus élevé, où résident Dieu et les saints; voir à H. Meinhardt, «Empyreum», Lexikon des Mittelalters 3 (1986), p. 1898.
40
Selon la doctrine catholique, Marie est restée vierge avant, pendant et après la naissance de Jésus.
41
Des vers de onze syllabes.
42
Le chœur des Muses.
43
Dans l’art, Marie est souvent représentée avec une couronne de douze étoiles en référence à la vision de Jean dans l’Apocalypse 12,1 (TOB; c’est nous qui soulignons): «Un grand signe apparut dans le ciel: une femme, vêtue du soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles.» Il n’est pas certain que les douze étoiles sur fond bleu du drapeau européen moderne aient été influencées par ce passage biblique, comme cela a souvent été supposé. Cette thèse a récemment été reprise par le politologue et ancien président du Comité central des catholiques allemands, Hans Maier, dans une lettre ouverte (H. Maier, «Am deutlichsten in der Europaflagge», Frankfurter Allgemeine Zeitung du 29 mai 2024, p. 18).
44
C’est-à-dire du soleil (Hypérion désigne ici Hélios).
45
La poétesse Sappho (vers 630-570 av. J.-C.), qui vivait sur l’île de Lesbos, compte parmi les auteurs les plus célèbres et les plus influents de la poésie grecque. Cependant, seule une petite partie de son œuvre a été conservée. Le fait que l’on ne dispose que de connaissances limitées sur sa vie a conduit dès l’Antiquité à la création de légendes autour de sa personne. Voir à son sujet H. Mommsen, «Sappho», Der Neue Pauly 11 (2001), p. 46-50.
46
Il s’agit sans doute ici de la strophe saphique, prétendument inventée par Sappho, que Barzaeus utilise également dans le texte latin ici, et dans les quatre strophes suivantes.
47
Tout comme les séraphins, les puissances appartiennent aux neuf chœurs angéliques de la tradition chrétienne. Cette hiérarchie céleste, largement façonnée par le pseudo-Denys l’Aréopagite aux Ve et VIe siècles, a exercé une influence durable sur l’imaginaire chrétien (voir à ce sujet la note 17).
48
La lune (Kynthia, ou en latin Cynthia) est un surnom d’Artémis, née sur le mont Kynthos, sur l’île de Délos; elle était entre autres vénérée comme déesse de la lune.
49
L’étoile du matin.
50
Ou choliambe (c’est-à-dire «iambe boiteux»).
51
Théon était à l’époque d’Horace un affranchi vivant à Rome, célèbre pour ses diatribes (cf. Hor. epist. 1,18,82); Barzaeus s’élève ici contre de tels critiques.
52
Le sournois Sisyphe (en grec: Sisyphos), personnage de la mythologie grecque, parvint même à tromper la mort à plusieurs reprises. En guise de punition, il fut condamné à pousser éternellement un rocher jusqu’au sommet d’une colline — rocher qui redescendait inlassablement chaque fois que le but était atteint. Le labeur de Sisyphe est ainsi devenu le symbole de l’effort vain, tout comme les critiques adressées à la Vierge Marie, qui, elles aussi, se sont révélées infructueuses.
53
Barzaeus s’adresse aux Muses, qui résidaient sur le mont Hélicon, en Béotie.
54
Barzaeus se réfère ici à la vision de Jean dans l’Apocalypse, 12,1, que la tradition catholique fait se rapporter à Marie: «Un grand signe apparut dans le ciel: une femme, vêtue du soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles» (TOB; c’est nous qui soulignons).
55
Il ne s’agit évidemment pas ici de la fonction romaine du même nom; le terme censor est utilisé par Barzaeus au sens figuré pour désigner des critiques trop sévères.