De Republica

Traduction (Français)

1. Le début du livre I

Alors que parmi les républiques libres, qui ne sont pas dirigées par le pouvoir d’un seul prince, à notre époque, selon le jugement de nombreuses personnes, après la république de Venise, la république des Suisses occupe la première place, j’ai souvent entendu des étrangers demander quels sont la forme et le système de notre république: il leur semblait étonnant qu’un si grand nombre de peuples, en faisant alliance, aient pu se fondre si rapidement pour ainsi dire en une seule cité et demeurer dans celle-ci tant d’années de manière constante et dans la concorde.

En effet, les Athéniens, dont la cité fut la plus célèbre de la Grèce, furent réunis par Thésée, à partir de très nombreux peuples et places fortes, non seulement en une seule cité, mais aussi en une seule ville. La république des Achéens, qui était constituée de douze villes, ne fut ni durable ni puissante, mais, alors que, sous Aratus et Philopœmen, elle était florissante, elle fut peu de temps après réduite en servitude par les Romains, alors qu’elle abusait de sa liberté. La République des Israélites, après la mort de Josué, exposée par sa faute à de fréquents pillages de ses ennemis, fut certes libérée quelquefois par des héros suscités par Dieu, mais finalement ces douze peuples, fatigués de leur liberté, se choisirent volontairement un monarque. Du temps de nos ancêtres, en outre, alors que, à l’initiative et sous la direction de l’empereur Frédéric, les villes de Souabe avaient conclu une alliance, au début celle-ci fut grandement estimée et considérée par tous, mais lorsqu’elle eut entrepris à la légère une guerre contre les Suisses, qui d’ailleurs échoua, elle perdit une grande partie de sa réputation; cependant, après avoir chassé le duc de Wurtemberg et détruit des places fortes tenues par les brigands sur tout le territoire de la Souabe, [les villes] semblaient l’avoir récupérée, mais, peu après que le terme fixé pour l’alliance eut expiré, elles allèrent soudain chacune de leur côté, au point qu’elles considérèrent comme des amis ceux qui auparavant étaient leurs ennemis, et qu’elles considérèrent leurs vieux amis et alliés presque comme des ennemis. C’est ainsi que, de mémoire d’hommes, cette alliance, à peine commencée, n’aboutit à rien.

Or il y a chez les Suisses un assez grand nombre de peuples et un nombre non négligeable de villes; il y a néanmoins une seule cité, une seule république, ce que, cependant, les savants mettent en doute, à ce que je constate; ils estiment en effet qu’il n’y a chez nous aucune communauté ou union de gouvernement, et que par conséquent cette république ne peut pas être qualifiée d’une; en effet, toutes les cités prises individuellement sont liées par les décrets pris par les autres de la même façon que si elles donnaient spontanément leur assentiment, comme dans les alliances privées entre personnes qui s’associent, tandis que dans une même république, ce qui a plu au plus grand nombre contraint tout le monde.

Quant à moi, je ne veux pas me disputer avec eux, et j’avoue franchement que, si l’on pèse exactement chacun de ces arguments, la situation est bien comme ils l’affirment; mais puisqu’il y a un seul conseil pour tout le peuple, que l’administration de la plupart des régions sujettes est commune, qu’ils décident tous ensemble de la paix et de la guerre, et qu’en outre ils ont des lois et des coutumes qui sont presque identiques et qu’ils sont si étroitement liés par des alliances perpétuelles que, si ce n’est pas une République une, du moins ils sont arrivés très près de la forme d’une république une, moi, qui écris et parle de ces choses de manière quelque peu grossière, j’appellerai cette union «cité de l’alliance suisse et république des Suisses».

Donc cette cité des Suisses, constituée par des alliances perpétuelles, a déjà protégé la liberté de notre patrie depuis plus de deux cents ans dans la plus grande concorde et dans une incroyable unanimité. En effet, bien qu’à de multiples reprises (ce qui a coutume d’arriver dans presque toutes les grandes républiques) des guerres civiles aient éclaté entre eux, cependant la paix ayant été rapidement conclue, tous les esprits se sont à nouveau unis dans un amour sincère et ont toujours été disposés à protéger avec leur ancien zèle la liberté de la patrie.

Il y en a cependant quelques-uns qui, par une haine terrible à l’égard du peuple suisse, nous reprochent avec une impudence excessive notre anarchie, et disent que nos ancêtres, après avoir exterminé ou soumis les nobles, ont proclamé leur liberté contre le droit et la raison; d’autres, même s’ils reconnaissent que nos ancêtres ont été poussés à prendre les armes par les graves injustices et outrages des nobles, pensent cependant qu’ils ont dépassé la mesure de la légitime défense, comme il arrive généralement aux esprits excessivement irrités.

C’est pourquoi, pour répondre à l’étonnement de nos amis, qui a pour origine l’ignorance de nos institutions, et pour réfuter les calomnies des jaloux, j’ai estimé qu’il valait la peine de décrire la forme de la république suisse en remontant un peu dans le temps pour partir de son origine.

 

2. Livre I: Histoire de Fribourg

La ville de Fribourg sur la Sarine fut fondée par le duc Berthold IV de Zähringen quelques années avant Berne, et les deux cités entretinrent pendant longtemps une amitié mutuelle; mais après la mort de Zähringen, Berne tomba sous la domination de l’Empire, tandis que Fribourg tomba au pouvoir des comtes de Kibourg, qui résidaient à Berthoud; c’est ce qui fut la cause, dans les années qui suivirent, de l’abandon de leur alliance avec les Bernois.

En effet, d’abord, ils combattirent contre les Bernois avec Gottfried de Kibourg; mais ensuite l’alliance fut renouvelée de part et d’autre; une clause restrictive fut toutefois ajoutée: si les maîtres de la ville entraient en guerre contre les Bernois, alors, l’alliance restant sauve, ils pouvaient suivre les intérêts de leurs maîtres. Puis Fribourg fut vendue par Kibourg à Rodolphe, roi des Romains, et demeura ensuite presque deux cents ans sous la domination de la maison d’Autriche; durant ce temps, sous la conduite et les auspices des Autrichiens, ils combattirent à Laupen, sur le Schönberg et ailleurs; mais à nouveau l’amitié et l’alliance anciennes furent renouvelées à plusieurs reprises.

Or, l’année 1403, accablés par les nombreux outrages de la noblesse, ils conclurent une alliance perpétuelle avec les Bernois, tout en restant sous la domination des Autrichiens. Cette amitié dura 45 ans, puis, une guerre ayant éclaté entre le prince de Savoie et Fribourg, les Bernois prirent le parti de la Savoie, avec laquelle il y avait une amitié et une alliance anciennes; de part et d’autre quelques expéditions furent entreprises; une première fois l’on combattit près du Gottéron, où les Fribourgeois furent vaincus; l’année suivante, finalement, les ambassadeurs du roi de France, du duc de Bourgogne et des Suisses conclurent la paix.

L’année qui suivit la conclusion de la paix, Albert d’Autriche vint à Fribourg; avec lui, certains des citoyens formèrent le projet de faire la guerre aux Bernois, mais la plus grande et la meilleure partie de ces citoyens préféraient la paix à la guerre, et défendaient fermement l’alliance qui avait été conclue; et déjà la situation semblait annoncer une guerre civile, et peut-être les citoyens auraient-ils commencé à combattre les uns contre les autres si les Bernois, qui avaient envoyé des ambassadeurs, n’avaient pas, avec une sagesse et une habileté remarquables, apaisé ce soulèvement populaire. Donc, comme l’Autrichien voyait que Fribourg était favorable aux Suisses et était enclin à rejoindre leurs rangs, et que, de même, les citoyens qui jouissaient des privilèges de leurs ancêtres n’obéissaient pas complètement à ses ordres, et aussi que souvent, conformément au traité, ils prenaient le parti des Bernois et faisaient la guerre aux côtés des Confédérés suisses, il commença à désespérer de pouvoir retenir plus longtemps la ville.

C’est ainsi qu’arriva à Fribourg le maître de la cour du prince d’Autriche, envoyé, comme on le rapporte, par le prince lui-même; cet homme fit courir dans la ville le bruit que le prince allait aussi bientôt arriver, et il commença à solliciter des objets d’or et d’argent de toute sorte, et d’autres ornements de diverses sortes pour embellir la mairie de la ville, car c’est en ce lieu qu’on disait que le prince serait reçu; mais lui veillait, à l’insu des citoyens, à faire emporter secrètement tous ces objets. Or le jour où l’on disait que le prince allait venir ayant été fixé, le maître de la cour sortit à cheval avec les siens à la rencontre du prince, et tous les plus illustres citoyens le suivaient. Ils s’avancèrent assez loin de la ville, mais le prince n’apparaissait nulle part; cependant, des cavaliers envoyés par le duc rejoignirent le maître de la cour et ses compagnons. Celui-ci, maintenant qu’il se sentait en sûreté, s’adressa aux Fribourgeois qui s’étaient avancés avec lui à la rencontre du prince pour lui faire honneur: confiants dans le traité conclu avec les Bernois et l’alliance avec le reste des Confédérés, ils méprisaient les ordres du prince; il était donc juste que le prince lui aussi retirât d’eux quelques avantages, et c’est pour cette raison qu’il avait emporté loin d’eux les objets d’argent et les ornements qu’il avait sollicités; sur ces paroles, il se rendit auprès du prince avec le butin pris sur la ville. Les Fribourgeois, affectés par une si grande injustice, s’unirent aux Bernois par un traité encore plus étroit et conclurent une alliance sous certaines conditions avec le reste des Confédérés. C’est pourquoi les Suisses, lors de la guerre de Bourgogne, leur envoyèrent une garnison pour protéger la ville, et eux-mêmes aussi combattirent contre la Bourgogne avec les Confédérés, et ils fournirent une aide courageuse et fidèle aux Suisses; à la fin de cette guerre, ils furent admis avec les Soleurois au nombre des cantons, comme nous allons le dire tout à l’heure.

 

3. Début du livre II

Nous avons exposé dans le livre précédent quelles sont les parties de la République suisse, et pour quelles raisons et dans quelles conditions elles se sont rassemblées, par de solides alliances, en une seule cité, avec quel zèle et quelle peine elles ont défendu leur liberté, et par quels peuples et quels princes elles ont été reçues au nombre de leurs alliés et de leurs amis. Maintenant, nous allons décrire la forme et l’organisation elles-mêmes de la République suisse. Or, parce que chacun des peuples unis par une alliance a ses magistrats, ses lois et sa république propre, et qu’en outre il y a une seule cité de toute la Suisse, et un conseil commun de tout le peuple, et des lois et des décrets publics auxquels tous sont tenus, je parlerai d’abord de l’ensemble de la cité, puis des républiques des cantons selon leur espèce.

Or, ceux qui ont écrit à propos de la république en définissent trois formes: la première, lorsque toute l’autorité et le gouvernement de la république sont aux mains d’un seul homme qui, s’il exerce le pouvoir équitablement selon les lois et avec l’assentiment du peuple, est appelé roi, et dans le cas contraire est considéré comme un tyran; la deuxième, lorsque le pouvoir est aux mains d’un petit nombre de nobles; la troisième, lorsque le peuple tout entier a le pouvoir. Il existe ainsi trois formes de république: le pouvoir des rois, celui des nobles et enfin celui du peuple; chacune d’entre elles cependant a trois formes corrompues de république: la tyrannie, l’oligarchie, qui est pour ainsi dire la tyrannie du petit nombre, et le pouvoir populaire, où abondent le désordre et l’anarchie. Cependant, nous ne pouvons rapporter la république commune de toute la Suisse à aucune de ces formes, mais, de même que les anciennes républiques des Romains et des Carthaginois, qui étaient tout à fait imposantes, et l’actuelle république de Venise peuvent être appelées mixtes, parce qu’à certains égards elles reflètent l’autorité royale, à d’autres égards le pouvoir des nobles, et aussi parce qu’elles n’écartent pas totalement le peuple de la direction des affaires, de même, la république des Suisses est un mélange entre le pouvoir des nobles et celui du peuple. Car, parmi les peuples dont la cité dans son ensemble est composée, certains pratiquent un pouvoir purement démocratique: presque tout s’y fait sur décision de l’ensemble du peuple, comme dans les cantons dépourvus de villes, c’est-à-dire Uri, Schwytz, Unterwald, Glaris et Appenzell (et il en va de même de Zoug, bien qu’elle possède une ville). D’autres sont dirigés par des nobles, ce qui est le cas de toutes les villes de Suisse: Zurich, Berne, Lucerne, Bâle, Fribourg, Soleure, Schaffhouse. Mais comme la puissance suprême est aux mains du peuple, par qui les magistrats sont choisis, ce sont des républiques mixtes, et certaines sont plus aristocratiques, d’autres plus populaires. Ainsi, comme la cité dans son ensemble est composée de ces peuples qui n’ont pas une seule et même forme de république, l’organisation politique qui résulte de ces peuples, de même, n’est pas une, mais mixte.

En effet, même si les délégués qui, dans les assemblées publiques, délibèrent en faveur du bien commun de la république des Suisses ou rendent la justice, paraissent constituer une organisation politique de nobles, cependant, comme la plupart d’entre eux sont, chez eux, choisis par le peuple, et que, dans les affaires d’une importance un peu plus grande, ils n’ont pas un total pouvoir de décision, mais font tout selon le mandat qui leur a été conféré par le peuple et sont contraints de lui rapporter chacun de leurs actes, il apparaît clairement qu’un tel conseil ne peut être considéré comme pleinement aristocratique. Or il semble tout à fait juste que la commune république suisse soit ainsi administrée, car la liberté dont se réjouissent et dont font usage les Suisses a été procurée par nos ancêtres, non par la décision et par l’œuvre d’un seul ou d’un petit nombre, mais c’est le peuple qui d’une part délibéra en faveur du bien commun, d’autre part se procura la liberté en ne reculant devant aucune dépense, peine ou épreuve, et c’est pourquoi il est très juste qu’ils récoltent le fruit de leurs peines. Ce qui, dans une république populaire, semble désavantageux et dangereux, lorsque tous donnent leur avis, et non plutôt tous les meilleurs et les plus sages, dans notre république est tout à fait dépourvu de danger, car c’est la plupart du temps tous les meilleurs et les plus sages qui sont envoyées de chaque canton à ces assemblées; ils n’ont pas le plein pouvoir de décision, ce qui en effet serait très grave et dangereux pour la liberté publique, mais ils échangent leurs opinions comme des sortes de conseillers sur les affaires les plus importantes, sur lesquelles, lorsqu’ils sont de retour, le peuple vote ensuite; or, ceux qui ne sont pas tout à fait stupides ou malhonnêtes peuvent facilement comprendre et approuver ce qui a été décidé pour le bien public, pourvu qu’on le leur explique correctement.

 

 4. Livre II: organisation politique, juridique et territoriale de Fribourg

Fribourg d’Avenches, tout comme Berne, est divisé en quatre quartiers: le premier est appelé quartier du Bourg, le deuxième quartier de l’Île ou du Pré (in der Aue), le troisième quartier de la Neuveville, le quatrième quartier de l’Hôpital. C’est dans ces quartiers que sont choisis ceux qui sont à la tête des conseils publics. Ceux-ci sont au nombre de deux, comme les conseils publics des autres villes: le grand compte 200 membres, le petit 24. L’élection a lieu le dimanche qui précède la fête de saint Jean-Baptiste. Le Petit Conseil administre les affaires de la ville, juge des appels des administrés, sauf ceux des bailliages de Savoie conquis lors de la dernière guerre. Les affaires qui concernent l’ensemble de la république et qui ont le plus d’importance sont renvoyées au conseil des Deux-Cents ou Grand Conseil. L’avoyer, qui préside les deux conseils, est élu par tout le peuple le jour de la Saint-Jean-Baptiste et occupe sa charge durant deux ans. Juste après l’avoyer viennent les quatre bannerets, qui sont à la tête des quatre quartiers de la ville; bien qu’ils ne fassent pas partie du corps ordinaire des sénateurs du Petit Conseil, il y assistent toujours au nom de l’ensemble du peuple, et ils ont le droit de vote, sauf dans les recours. Si l’on propose quelque chose qui leur semble concerner le Grand Conseil, ils peuvent y renvoyer toute la discussion. Ils occupent leur charge durant trois ans et sont choisis par les deux conseils, comme c’est le cas de la plupart des autres magistrats. Vient ensuite la dignité de trésorier; c’est au trésorier que sont confiés les finances de la ville et tous ses revenus; il a pour l’aider le secrétaire de la ville (ou son remplaçant), qui consigne tout ce que le trésorier a reçu ou dépensé. Au trésorier revient aussi le soin des édifices publics. Il rend compte deux fois par année au Petit Conseil et occupe sa charge durant trois ans. À Fribourg, il y a quatre secrétaires principaux: le premier, qui est appelé secrétaire de ville, puis le secrétaire du Conseil, le troisième est le secrétaire du pays, le quatrième le secrétaire de justice. De même, la charge de Grand sautier (des Grossweibels) est à l’honneur à Berne et à Fribourg; la plupart du temps il assiste l’avoyer et, lorsque les sénateurs se réunissent, il se tient à la porte, appelle les parties, compte les votes, prend soin des prisonniers; sa charge dure trois ans.

Voici l’organisation de la justice à Fribourg. D’abord une assemblée particulière de juges examine et juge les différends entre citoyens; c’est pourquoi il est appelé tribunal de la ville (das Stadtgericht). La charge de ces juges est aussi d’interroger les prisonniers à propos de quelque chef d’accusation et de les soumettre à la question, et ensuite de faire un rapport détaillé au Conseil. La deuxième assemblée juge des causes des paysans et est appelée le tribunal de la campagne (das Landesgericht). En outre, dans chaque tribunal, il y a deux membres du Petit Conseil et huit membres du Grand Conseil; ils occupent leur charge durant trois ans et se réunissent trois fois par semaine; il est possible de faire appel de leur sentence au Petit Conseil. En outre, douze juges choisis dans les deux conseils jugent des appels des bailliages qui ont été pris lors de la dernière guerre de Savoie, et ils se prononcent à ce sujet; ils se réunissent une fois par mois, et il n’est pas permis de faire appel de leur sentence.

À Fribourg, comme dans les autres villes, il y a deux types de bailliages: les bailliages proches de la ville, administrés par les sénateurs, qui néanmoins habitent en ville et s’acquittent de leur charge de sénateurs (si je ne me trompe pas, ces bailliages sont au nombre de cinq), et ceux où les baillis sont envoyés avec les pleins pouvoirs et où ils demeurent; Fribourg a quatorze bailliages de ce genre, et en outre il en a quatre en commun avec Berne. Or les baillis sont élus par les deux conseils le lendemain de la Saint-Jean-Baptiste et ils sont à la tête des bailliages durant cinq ans, mais tous les ans ils rendent compte devant le Petit Conseil. Les baillis instruisent aussi les procès pour les crimes capitaux, mais ils informent le Conseil du déroulement et de la sentence de chaque cause; le Conseil a l’autorité d’approuver, de modifier ou d’adoucir la sentence.

À Fribourg, les engagements à comparaître (trostungen) et ce qu’en langue vernaculaire on appelle les leistungen (sous ce nom, on entend aussi le bannissement pour un certain temps, ainsi que les dépenses qui résultent lorsque l’argent prêté n’est pas payé à temps; les choses se passent de la manière suivante: si le débiteur ne paie pas sa dette au jour fixé, le créditeur envoie un ou deux serviteurs, ou davantage, avec des chevaux dans une auberge publique, et le débiteur est contraint à fournir aux dépenses et à payer ainsi sa dette, jusqu’à ce que le créditeur soit satisfait; certains affirment que ce droit a été institué par le duc de Zähringen) sont soigneusement observés, et ceux qui les enfreignent ou les violent sont punis de la prison, de l’exil ou d’une amende, et un magistrat particulier, qui est appelé bourgmestre, est chargé de ces questions. En outre, en cas de litige, si quelqu’un est assigné à comparaître et qu’il ne se présente pas par trois fois, il est puni de bannissement; la même peine est réservée à ceux qui violent la paix qu’on leur avait enjoint et ordonné de vivre avec un autre; de même ceux qui sans juste cause se sont joints à l’une ou l’autre des parties en désaccord.

Finalement, les jours où l’on a combattu contre Charles de Bourgogne à Grandson et à Morat, c’est-à-dire le 2 mars et le 22 juin, sont des fêtes, et chaque année ils sont célébrés en grande pompe et par une procession de tous les ordres dans la ville.